Une initiative citoyenne menée par un enseignant de Calgary s’est rapidement transformée en une pétition provinciale visant à réformer en profondeur le système de financement des écoles privées de l’Alberta. Cette campagne, pilotée par l’Association des enseignants de l’Alberta (ATA), a pour objectif de supprimer le financement public des écoles indépendantes et des écoles à charte et de transférer ces fonds vers les écoles publiques, particulièrement en sous-effectif et surpeuplées.

Afin de recueillir les quelque 178 000 signatures nécessaires pour déclencher un référendum, ce projet a déjà mobilisé près de 250 bénévoles depuis octobre 2025. Ce chiffre remarquable, qui représente 10 % de l’électorat provincial, témoigne du potentiel de cette initiative pour engendrer des changements significatifs. La campagne est remarquablement bien organisée et repose sur une approche de terrain combinant mobilisation locale, recueil de signatures papier et porte-à-porte. L’objectif est clair : susciter un débat sur la répartition des fonds publics dans un contexte de financement de l’éducation de plus en plus difficile.
| Élément | Informations |
|---|---|
| Origine | Pétition lancée par un(e) enseignant(e) à Calgary |
| Objectif | Mettre fin au financement public des écoles privées et à charte en Alberta |
| Signatures requises | Environ 178 000 pour déclencher un référendum |
| Durée | 4 mois (à partir d’octobre 2025) |
| Soutien principal | Alberta Teachers’ Association (ATA) |
| Effort de mobilisation | ~250 collecteurs engagés, objectif : 2 000 |
| Montant estimé du financement privé | Selon l’ATA : 461 millions de dollars (gouvernement : 314 millions) |
| Arguments principaux | Sous‑financement des écoles publiques, classes surchargées, inégalités |
| Contre‑arguments | Écoles privées plus flexibles pour élèves à besoins spécifiques |
| Source de référence |
Un problème majeur affecte les écoles publiques de l’Alberta. La croissance démographique liée à l’immigration, la forte augmentation des besoins particuliers (comme l’autisme, le TDAH et les troubles d’apprentissage), la hausse notable des comportements perturbateurs et l’encombrement croissant des classes figurent parmi les facteurs en cause. Un récent sondage de l’ATA a révélé que 85 % des enseignants sont confrontés au stress émotionnel ou cognitif des élèves, et 93 % d’entre eux signalent des cas d’hostilité en classe. Ces situations sont devenues inacceptables pour les éducateurs.
Par ailleurs, certains perçoivent les écoles privées comme des modèles d’efficacité. Plus de ressources, moins d’élèves, des frais de scolarité plus bas et un choix plus large d’admissions. Cette opposition est toutefois jugée injuste par les défenseurs de l’éducation publique. Ils dénoncent une situation où des établissements qui ne répondent pas aux besoins de tous les élèves, en particulier les plus défavorisés, bénéficient de subventions publiques. Cette répartition engendre une dynamique concurrentielle considérée comme profondément inéquitable.
C’est particulièrement vrai en Alberta, où le gouvernement a dépensé 314 millions de dollars pour l’éducation privée en 2021 ; si l’on tient compte des dépenses indirectes, l’ATA porte ce montant à 461 millions de dollars. Face aux problèmes urgents que rencontrent les écoles publiques – manque d’enseignants spécialisés, classes surchargées et infrastructures vétustes –, ce montant est considérable. L’indignation publique est alimentée par cette disparité même.
Les opposants à la pétition, quant à eux, insistent sur la diversité des besoins éducatifs. Ils affirment que les enfants ayant certains profils – comme ceux qui ne parlent pas anglais, les jeunes en situation de handicap, les élèves à haut potentiel ou ceux qui risquent de décrocher – bénéficient grandement de la diversité pédagogique offerte par les écoles indépendantes. Ces établissements sont réputés pour leur grande adaptabilité et leur capacité à proposer des solutions personnalisées. Certains soutiennent que la suppression de leur soutien pénaliserait les familles qui ne trouvent pas de place dans le système public.
Le président d’une association scolaire favorable à l’indépendance déplore une campagne qui s’appuie sur ce qu’il qualifie de « contrevérités » dans une tribune. Il souligne que, comparativement aux écoles publiques, les écoles privées ne reçoivent qu’environ 70 % du financement par élève, alors qu’elles scolarisent près de 6 % des élèves de l’Alberta. Selon lui, la diversité en matière d’éducation doit être préservée et non éliminée.
À y regarder de plus près, il apparaît clairement que la pétition porte sur le financement public des écoles privées plutôt que sur leur existence en général. Il s’agit d’un appel à une redéfinition des priorités, à une réaffectation judicieuse et responsable des fonds publics. L’objectif est d’investir dans des établissements capables d’accueillir un grand nombre d’élèves tout en offrant des conditions d’apprentissage décentes, dans un contexte où chaque dollar compte.
Le fait que cet argument dépasse largement le cadre scolaire est très intéressant. Il contribue à des débats de société plus larges sur le rôle de l’État, l’égalité des chances et la responsabilité collective. Cette initiative rappelle des pétitions similaires qui ont récemment remis en question la pertinence du financement public des écoles sélectives au Canada et en Europe.
Les enseignants mobilisés espèrent que cela débouchera sur un dialogue institutionnel constructif. L’objectif serait de redéfinir les paramètres d’une politique équitable plutôt que de comparer deux modèles éducatifs, surtout dans le contexte post-pandémique où les inégalités socio-économiques et éducatives se sont considérablement aggravées.